DU SANG DANS LA CULOTTE

Extrait du livre « Betty » de Tiffany McDaniel, qui est d’une puissance et d’une poésie incroyable.

Conversation entre Betty et Fraya sa grande sœur, américaines métisses d’un père cherokee et d’une mère blanche. Lorsque Betty découvre du sang pour la première fois dans sa culotte :

⠀⠀⠀⠀ "- Tu vois, dans certaines cultures, on giflait les filles quand elles saignaient pour la première fois, m’a dit Fraya en posant gentiment la main sur ma joue. C’était une vraie gifle, en plein sur la joue. Mais dans d’autres cultures, comme chez les Cherokees, le sang était considéré comme un signe de pouvoir. En fait, les cherokees croyaient qu’une femme avait tellement de pouvoir quand elle saignait qu’elle restait dans une hutte construite spécialement pour l’abriter pendant ses règles. Elle restait à l’écart des autres. ⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀ - Comme une punition ? ⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀ - Non. Cette hutte n’était pas imposée aux femmes. Elles pouvaient choisir d’y entrer ou non. C’était notre pouvoir. ⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀ Elle a pris mon visage entre ses deux mains. ⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀ - Comment tu sais ça, Fraya ?⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀ - Je l’ai lu dans un livre à la bibliothèque. Dedans, il y avait une légende cherokee qui parlait d’un homme de pierre. Quand cet homme de pierre venait terroriser la tribu, les femmes qui avaient leurs règles formaient une rangée au bord du chemin. À chaque fois qu’il passait devant une femme, l’homme devenait de plus en plus faible, jusqu’à ce qu’il s’écroule par terre. Les femmes l’avaient détruit grâce au pouvoir de leur sang. Elles sauvaient leur village et tous ceux qui y vivaient. (Elle a incliné la tête.) Si nous étions à cette époque-là, je t’honorerais en te tissant une ceinture. Je te ferais une jupe en peau et une broche en os. Mais aujourd’hui, je n’ai que ça à t’offrir.

⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀⠀ Elle a tendu la main pour prendre dans son placard une boîte de serviettes hygiéniques. Elle m’a montré comment les utiliser tout en me donnant les instructions concernant les ceintures hygiéniques."